« Mais pourtant je pensais que si car je suis joueur.se et mignon.ne tel.le une loutre qui batifole dans son ruisseau avec ses ami.e.s ». NON. Et non. Et non et non et non. C’est séduisant, ça fait bien, mais vous n’avez pas d’animal totem, je n’ai pas d’animal totem et ce coup de gueule pour expliquer pourquoi nous n’avons pas le droit d’en avoir tient en deux mots.
L’APPROPRIATION CULTURELLE
(si tu as pensé à l’instant « le l’ compte comme un mot alors il y en a trois » c’est mal et maintenant tu as Despacito dans la tête.)
L’appropriation culturelle donc. Ou whitewashing, bref, l’ethnocentrisme blanc européo-américain qui se permet sans ménagement de piétiner l’histoire vivante et millénaire des peuples Anishinaabe et des autres tribus natives nord-canadiennes. L’histoire vivante, mais aussi les croyances et la foi de ces communautés minoritaires qui luttent encore pour leur dignité et le droit d’être reconnues.
Trouver son animal totem prend place au sein d’un rituel initiatique aussi sacré que secret et clamer que la loutre est votre animal spirituel parce que c’est « mignon » vous fait sonner, aux oreilles d’un Anishinaabe, comme cette personne ignorante qui est en train de joyeusement fossoyer tout son héritage ancestral et de recouvrir son cadavre de bouse. Et puis comment s’imaginer être jaguar ou éléphant quand on vit en ville, loin de toute vie sauvage ? N’étant pas native, et donc illégitime, je m’arrêterai là en ce qui concerne ce concept.
Ca, c’est dit.
Daemon et patronus : c’est mieux. De la fiction à la psychanalyse
Cela étant dit, qu’est ce qu’il nous reste si l’ont veut vraiment s’associer à un animal ? Eh bien déjà ne plus dire « animal totem » mais puiser dans notre culture à nous bien occidentale, au sein d’œuvres que nous connaissons intimement. Nous avons de merveilleux exemples de lien intime entre humain et forme animale, dont deux nous viennent directement de la fiction occidentale, inspiré par la psychanalyse jungienne : le Patronus et le Daemon.
Le Patronus, qui nous vient de l’univers d’Harry Potter, est connu (vous avez sûrement dû créé un compte sur Pottermore afin de voir le votre). Sort de défense ultime contre les Détraqueurs, très difficile à réaliser, il est la manifestation de l’énergie positive la plus pure, souvent alimentée par un de nos souvenirs d’amour et de joie les plus puissants. Exécuter le sort le fait jaillir de la baguette sous la forme d’un animal (cerf, chien, lapin, dauphin …) représentant cette énergie en pleine charge qui, en percutant le Détraqueur, le balaye immédiatement.
Le Daemon est plus complexe et nous vient de la saga « A la croisée des mondes » de Philipp Pullman. Dans l’univers de Lyra, un des deux personnages principaux de la série, chaque humain naît accompagné d’un daemon sous forme animal. Cet être physique possède un nom, et ne peut pas s’éloigner de son humain. Métamorphe jusqu’à l’adolescence (Pantalaimon, le daemon de Lyra, s’amuse à passer de jaguar en papillon de nuit, en passant par une musaraigne ou une fouine), c’est en entrant dans l’âge adulte que le daemon prend une forme fixe, miroir de l’individu auquel il est lié. Et on ne choisi pas. Dans l’histoire, certains veulent des lions, et se retrouvent avec des caniches !
Parce que le daemon n’est pas comment on aimera se voir. A l’inverse du patronus, il n’est pas non plus que pure énergie positive. Il représente tout simplement ce que l’on est à l’intérieur, de notre vision de nous-mêmes à ce que l’on transmet aux autres, dans nos tares, nos succès, notre lumière et notre ombre, bref, ce qui est au fond de nous. Le daemon est donc un ami, un confident à qui on peut parler, mais aussi un guide et un conseiller. Ou une conseillère, le genre du daemon étant la plupart du temps tout le temps opposé au notre.
Un genre opposé au notre … exactement comme le serait celui de notre inconscient. Oui, Pullman s’est énormément inspiré des théories psychanalytiques et nous quittons la fiction pour nous tourner vers le célèbre Jung, qui explique que l’ont peut représenter notre inconscient sous la forme d’un enfant de 7 ans (l’âge de l’inconscient) et d’un genre opposé au notre (je ne sais pas comment Jung juge les non-binaires).
L’animal, un message
Si vous voulez vraiment vous associer à un animal, fermez ce quizz sur animalspirituel.com et tournez-vous plutôt vers votre inconscient. Je ne dis pas que les daemons existent (quoique certain daemians se sont entichés du concept, moi le premier, mais plus pour ce que ça représente plutôt que par réelle croyance littérale), mais que certaines techniques, notamment d’hypnose et d’auto-hypnose spécialisée dans l’ouverture vers notre inconscient, permettent de se connecter à une partie de soi en se plaçant dans un état proche de celui du rêve éveillé. La pression du conscient/surmoi étant évacuée, il est possible que la manifestation de l’inconscient d’un individu lui apparaît, comme dans un rêve, sous la forme d’un enfant de 7 ans … ou parfois, rarement, d’un animal.
Cet animal, apparaissant après le travail hypnotique, ne protège pas. Il n’est pas investi de pouvoir magique, il n’a pas la formidable prestance physique d’un daemon ou la classe lumineuse d’un patronus. Il est, tout simplement, quand on tombe dessus, et il s’impose dans leur humilité. Il n’y a pas de choix conscient ou de test miraculeux à refaire pour le trouver. C’est tout simplement une représentation de soi.
Remettons donc de l’ordre dans tout ça. Non, nous n’avons pas d’animal totem ou spirituel. Si on y tiens vraiment, on peut parler de patronus ou de daemon quand on sait à quoi ils font référence en évitant de s’approprier tout un pan de culture qui n’est pas le notre. Mais il faut savoir que l’on peut toujours écouter ce qu’il y a au fond de nous grâce à un travail d’hypnose et d’auto-hypnose et voir la manière dont notre inconscient se projette et quel langage symbolique il utilise pour se représenter face à nous … et ainsi, parvenir à se connecter plus facilement avec cette partie de nous-même.