J’ai lu l’autre jour en naviguant sur le world wide web un petit texte qui invitait toutes les personnes à garder leurs noyaux ou pépins de fruits qu’elles consommaient durant l’été et à les jeter par la fenêtre lorsqu’elles circulaient en voiture sur des routes de campagne par exemple et ce afin de reboiser « la nature ». J’ai trouvé que c’était une jolie idée et je me suis surprise à imaginer des routes de campagne bordées de centaine d’arbres fruitiers.
Cependant force est de constater que toute mon enfance j’ai eu beau cracher mes noyaux de cerises ou jeter mes noyaux d’abricots dans mon jardin, ça n’a jamais rien donné.
Alors comment réussir à planter des noyaux ou des pépins ?
Germination
C’est assez évident quand on commence à s’intéresser de plus près à la question. En effet, faire germer un noyau est une tâche qui demande un peu de travail. Les processus de germination sont divers et varient selon le fruit et même l’espèce, mais la plupart du temps il est nécessaire de simuler un hiver en plaçant les noyaux dans du coton par exemple et les mettre au frigo pendant parfois 2 ou 3 mois. Pour certains fruits, il faut d’ailleurs casser le noyau afin de récupérer les amandes qu’ils contiennent. Forcément ça remet en perspective notre reforestation des campagnes.
Bien évidemment l’étape du frigo n’est pas obligatoire, vous pouvez aussi vous contenter de mettre votre noyau dans un pot avec un mélange de terreau et de sable et espérer que cela fonctionne. Mais les chances sont minimes.
Récolter ses propres fruits ?
C’est là le plus intéressant quand on s’intéresse aux fruits, et là il va falloir un peu s’accrocher car c’est un peu compliqué quand on n’a aucune notion de biologie ou de jardinage (ce qui était mon cas, rassurez-vous).
Je racontai à mon père l’autre jour que j’avais mis des amandes de noyaux d’abricots à germer au frigo et que j’espérais (naïvement) que d’ici quelques années je pourrais planter dans mon (futur) jardin plein d’arbres fruitiers. Je lui disais en passant que c’était si simple que je ne comprenais pas que si peu de gens fassent ça dans leur jardin. Il me regarda un peu peiné en m’expliquant qu’il y avait très peu de chances que mes fruits (si fruits il y avait) soient bons et sucrés en m’indiquant que tous les fruits que l’on consommait dans le commerce provenaient d’arbres préalablement greffés afin d’en garantir une variété donnée.
En effet, l’abricotier, (appelons-le abricotier 2) qui naîtra du noyau germé que j’aurai planté ne présentera pas les mêmes caractéristiques que l’arbre dont il est issu (nommons-le abricotier 1).
Pour faire (très) simple, l’abricotier 1 fait ses petits bourgeons et au printemps, ses bourgeons fleurissent. Chaque fleur représente un ovaire. C’est la pollinisation (grâce à nos chères abeilles) qui va permettre d’implanter des gamètes dans chacun des ovaires. Comme pour nous. Cet embryon ne deviendra pas un bébé (ouf) mais le fameux noyau qui est actuellement dans mon frigo.
C’est pourquoi, chaque pépin ou noyau possède ses caractéristiques génétiques propres.
« Ce que nous appelons le fruit, c’est le développement du réceptacle de la fleur qui se charge de matières nutritives pour subvenir aux premiers besoins du jeune arbre issu de la germination de la graine.
http://www.vergers-vivants.fr
Donc, quel que soit le pollen qui féconde une fleur, le fruit obtenu sera toujours le même puisque c’est un grossissement du réceptacle. Par contre, chaque graine sera différente puisqu’elle a son propre patrimoine génétique. Comment ce patrimoine génétique se traduira-t-il dans le nouvel arbre obtenu ? Pour le savoir, il faut semer la graine et attendre 10, 12, voire 15 ans pour que l’arbre produise ses premiers fruits qui seront obligatoirement différents des parents. Avec de la chance, on peut obtenir une nouvelle variété intéressante, mais le plus souvent on assiste à un retour vers le sauvage. »
C’est pourquoi, loterie de la génétique oblige, je n’ai aucune idée du goût qu’auront les fruits de l’abricotier 2.
Mais alors, comment se fait-il que les abricots (ou autres fruits) de notre commerce aient quasiment tous le même goût ?
Greffage et sélections
Le greffage est une technique qui consiste (en gros) à associer les caractéristiques d’un arbre à un autre. Il s’agit de choisir un arbre qui servira de base (le porte greffe) dont les aptitudes ont prouvé qu’il s’adaptait bien à l’environnement dans lequel on va le planter (sol, climat…) et d’y associer un jeune rameau (le greffon) issu de la variété que l’on a sélectionné et que l’on veut reproduire (abricotier 1 par exemple).
Cette technique aurait plus de 2500 ans !
Bien évidemment c’est plus compliqué en réalité que sur le papier. Il existe bon nombre de subtilités mais je ne me permettrais pas de me lancer dans un cours sur les greffes (car il en existe plus d’une sorte !). Toujours est-il qu’il faut reconnaître que la connaissance actuelle en agronomie nous permet de très bons résultats.
Pour conclure…
Je n’ai qu’une chose à dire : amusez-vous avec les noyaux ! Internet est votre ami… vous trouverez toutes les étapes nécessaires pour la germination de chacune des espèces de fruits. Il existe aussi de nombreux livres sur le sujet. Pour vos propres récoltes cependant il faudra probablement attendre une dizaine d’années… et sans greffage vous n’avez pas l’assurance d’avoir de bons fruits (dans le sens sucré et doux, pas dans le sens comestible). Mais ça peut être amusant quand même et permettre de créer de nouveaux arbres.
En tout cas, à l’heure de l’effondrement de nos ressources, il est à mon avis grand temps de reprendre le contrôle de ce que l’on mange !